CÉLINE Louis-Ferdinand (1894-1961).

Lot 26
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Estimation :
300000 - 400000 EUR
CÉLINE Louis-Ferdinand (1894-1961).
MANUSCRIT autographe signé « LF Céline », Nord, [1960] ; 1 565 pages in-4 (27 x 20,5 cm), reliées en 4 volumes, maroquin vert janséniste, les plats de chaque volume faisant lire, en les assemblant, la phrase suivante inscrite en lettres dorées imitant une écriture manuscrite : « Docteur Destouches, 4 rue Girardon, ne nous a semblé atteint d'aucune affection transmissible », dos long, chemise et étui (Mercher, 1970). Monumental manuscrit complet, très corrigé, du roman Nord. Deuxième roman de la trilogie allemande, transposant sous forme romanesque les pérégrinations en Allemagne, à la fin de la guerre, de Céline, sa femme Lucette et leur chat Bébert, en compagnie de l'acteur Le Vigan, Nord fait suite à D'un château l'autre (1957). Sa rédaction va durer deux ans et demi, du printemps 1957 à la fin de 1959 ; le roman paraîtra chez Gallimard en mai 1960. Citons l'excellent prière d'insérer rédigé par Roger Nimier : « Céline au milieu de l'Allemagne en flammes, tel est le sujet de Nord. Acteur, récitant et voyant à la fois, l'auteur se retrouve à Baden-Baden, dans les mois qui précèdent l'effondrement du Reich. Étrange palace où le caviar, la bouillabaisse et le champagne comptent plus que les bombardements. Étonnante baronne von Seckt, survivant d'un autre monde [...] Puis c'est Berlin, aux maisons éventrées, l'étalage d'une organisation tracassière au milieu des ruines. Céline et ses compagnons d'infortune (sa femme Lili, l'acteur Le Vigan, le chat Bébert) sont envoyés à cent kilomètres de la capitale, à Zornhof, dans une immense propriété régie par un fou. [...] Et autour des quatre Français (car Bébert compte bien pour un Français) vit une famille shakespearienne dans un pays habité par des Polonais, des prostituées berlinoises et des objecteurs de conscience, tous gras et robustes, auxquels le Reich fait fabriquer des cercueils. Céline se veut chroniqueur ; mais il décrit l'Allemagne de la débâcle comme Dante visitait les cercles de son Enfer ».... .../... Nimier qualifiera encore Nord comme le « plus beau livre de Céline depuis Voyage au bout de la nuit ». Le manuscrit est rédigé au stylo bille bleu sur papiers bleu, blanc ou jaune. Il est paginé de façon continue, de 1 à 1565. Le texte est divisé en 44 séquences, dont le numéro est porté au crayon rouge au début de chacune d'elles. Le manuscrit a été relié en quatre volumes. I : titre « NORD Roman », séquences 1 à 12, pag. 1-356 ; II : séquences 13 à 18, pag. 357-761 ; III : séquences 19 à 33, pag. 762-1141 : IV : séquences 34 à 44, pag. 1142-1565. Ce manuscrit correspond à la version finale, mise au point après des mois de travail acharné, et confié à Marie Canavaggia pour établir la dactylographie (qui sera remise à Gallimard le 23 décembre 1959) ; quelques mots sont écrits d'une main différente, probablement celle de Marie Canavaggia, transcrivant l'écriture difficilement lisible de Céline. Le manuscrit présente cependant environ 5 000 mots ou passages biffés, corrigés ou ajoutés. Chaque page porte les marques d'une opiniâtre relecture et des méticuleuses améliorations apportées par Céline à sa phrase. Les corrections qu'il apporte aux dernières pages sont d'une écriture déformée par la hâte ou l'angoisse, encore plus tourmentée que celle des premières. Sous les ratures, on voit par exemple Céline hésiter sur les relations de parenté des membres de la famille von Leiden ; on le voit s'acharner à mettre au point sa phrase par ratures successives, par exemple : « le dernier des [repris de pissotières] [carambouilles] parricides » ; ou bien « les deux [survivants] [pauvres blessés] [débris] [capilotades] [bribes] zigotos » ; la fin d'un passage sur Anne Frank, nommée « Esther Loyola », a été fortement corrigé : « nous avons éprouvé aussi certes ! mais que ça ne [m'a] nous a rien rapporté ! [nom de Dieu] crédié là non ! non !... ni Sainte Chapelle, ni [Hollywoad] contrats d'or (mes frères de race sont [des gens de maison] [effrénés] [autant d'effrénés laquais] gens de maison, Esther [elle est bien née, voilà !] est de ceux qui donnent les ordres... » Au bas de la dernière page, on peut lire cet envoi autographe : « Hommage à Renée Cosima Bolloré maman d'Anne LF Céline Meudon 6 juin 60 ». Gwen-Aël Bolloré a relaté, dans ses Mémoires parallèles (1996, p. 83-87), l'histoire de l'acquisition en 1960 du manuscrit de Nord, d'abord proposé par Céline à son frère Michel, qui en offrit une somme dérisoire. Outré, Céline déclara à Renée Bolloré, qui fréquentait le cours de danse de Lucette Almanzor : « Jamais je ne vendrai ce manuscrit à ton bourgeois de beau-frère, même s'il m'en offrait dix fois plus. Mais dis à ton mari qu'à ce prix il est à lui ». Et cet ancien combattant de la France Libre ajoute : « C'est ainsi que j'acquis, la main un peu forcée, cette pièce importante [...] Je le fis relier en quatre gros livres, plein maroquin décoré par Mercher, ce qui me coûta au moins le prix d'achat. Je l'offris à mon épouse pour je
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