GAUGUIN Paul (1848 - 1903)

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GAUGUIN Paul (1848 - 1903)
L.A.S. «Paul Gauguin» (minute), Atuana Décembre 1902, «À Monsieur le Lieutenant Commandant la Gendarmerie - Papeete» ; 7 pages et demie in-4 (petites fentes aux plis). Vigoureuse dénonciation des agissements et malversations d'un brigadier de gendarmerie. [D'autres dénonciatins vaudront à Gauguin d'être poursuivi pour diffa­mation d'un gendarme dans l'exercice de ses fonctions, et condamné le 31 mars 1903 à trois mois de prison et 55 francs d'amende.] «Si désagréables que soient les tracasseries méchantes et inutiles suscitées par la gendarmerie (terreur des honnêtes gens), les colons mécontents ainsi que les indigènes se soumettent et endurent avec patience les mauvais traitements - habitués d'ailleurs de longue date par de nombreux précé­dents à un pouvoir absolu et fantaisiste des gendarmes. Certainement le brigadier peu au courant des lois a le droit de se tromper - plus ou moins volontairement - d'inscrire à tort sur ses régistres des impôts, et perce­voir quelques uns le triple de leur valeur ; avoir comme on dit quelques privilégiés : peut-être la femme du Brigadier a-t-elle le droit de frapper avec violence les prisonnières qui exécutent mal son ouvrage. Mais ce qui nous paraît excessif (Peut-être connaissons nous mal les lois et les règlements) et intolérable c'est d'employer les fonds du contribuable pour des travaux de route qu'un gendarme (dit-on) n'a pas le droit de décréter ; puis aussi de se servir des prisonniers et de leur gardien uniquement pour son service particulier et celui de sa femme.»... Gauguin prie le lieutenant d'intervenir «pour éviter le scandale», et empê­cher le renouvellement de ces méfaits. Et il veut le mettre au courant de la situation : «La route conduisant d'Atuana à Taoa a été ordonnée et exécutée par les soins du Gouvernement, et tout le monde s'en contente, sauf un colon ami du brigadier ayant une grande propriété à Taoa et l'Evêque qui possède une grande partie de la vallée. Monsieur Charpillet (ingénieur compétent sans doute) a trouvé qu'il y avait lieu de modifier son tracé et à ce sujet il est venu me demander mon approbation prétendant que cette future route rendue plus tard carrossable augmenterait considéra­blement la valeur des propriétés de Monseigneur : puis aussi me serait utile pour la promenade étant le seul à avoir une voiture». Mais Gauguin a désapprouvé «ces travaux inutiles pour tout le monde», l'argent de la colonie n'ayant pas à servir à satisfaire ces caprices. Mais «le Brigadier a mis son projet à exécution», alors que seul le Gouverneur a le droit de modifier le tracé d'une route... À la fin de la lettre, Gauguin donne des détails avec un croquis sur cette affaire de route. Le Brigadier a utilisé «les prisonniers et leur gardien payés par l'argent du contribuable» pour les cultures et la pêche destinées à sa table, ou pour «grandes expéditions de chasse de moutons pris dans les vallées lointaines», puis parqués dans l'enclos de la gendarmerie, «soignés et nourris par les prisonniers» pour la table des missionnaires ou celle du Brigadier. Ces prisonniers étaient aussi employés par lui pour divers tra­vaux domestiques. Quand il n'y eut plus de prisonnier, c'est le gardien de prison Sulpice qui a servi «de cuisinier et de domestique» au Brigadier. Sulpice étant tombé malade, le Brigadier le chassa, et lui supprima ses appointements, «ce qui indigne les colons», qui estiment que «les contribuables sont tenus de payer de gros appointements au gendarme mais non tenus de lui payer un domestique»... «Voilà beaucoup de façons de faire qui irritent les honnêtes gens et tendent avec ce régime arbitraire de terreur à déconsidérer le corps de la gendarmerie, l'administration et par suite faire haïr les Européens par l'indigène»... Gauguin cherche, avec l'aide de quelques colons et du pasteur Vernier, à «contrebalancer cette oeuvre néfaste», en soignant à leurs frais les indigènes malades, et en étant généreux avec ces gens si pauvres, en leur apprenant «quels sont leurs droits», en payant les contraventions... «Mr le Brigadier fera tous ses efforts pour chercher à me faire poursuivre pour excitation à la révolte, me signalera comme homme révolutionnaire et dangereux [...] Je suis au contraire un homme excessivement philosophique et pacifique dont l'honorabilité jusqu'à présent n'a jamais été contestée». Et Gauguin de conclure : «Il n'est vraiment pas admissible de laisser gâter notre argent de cette façon par un gendarme même intelligent, et le public serait parfaitement en droit de réclamer cet argent au gendarme»...
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